1336 jours de lutte : Paroles de Fralibs
Fralib est une entreprise qui produit du thé. En 1976, elle est achetée par la multinationale Unilever. Après quelques années de fermetures et délocalisations, en 2010, Unilever annonce la fermeture de l’usine Fralib de Géménos (près de Marseille) et la délocalisation de la production. Les employé.es manifestent et parviennent à obtenir fin 2014, après 1336 jours de luttes et de tractations judiciaires, un accord avec Unilever, qui leur versera 20 millions d’euros pour financer leur projet de coopérative ouvrière, SCOP-Ti.
1336 jours, c’est long. Surtout quand ce sont 1336 réveils inquiets et incertains. Mais c’est ce qu’il a fallu pour faire plier Unilever durant l’une des plus importantes luttes sociales de ces dernières années. On peut mesurer l’importance de ce conflit à sa durée bien sûr. Toutefois, ce qui importe peut-être le plus, ce sont les résultats. Car les ex-Fralibs qui se sont battus contre Unilever n’ont pas occupé leur usine en vain. Leur victoire c’est leur SCOP1 et leur marque, nommée 1336 comme pour graver ce nombre dans les mémoires. Parce qu’il s’agit bien de cela : d’espoir, d’expériences positives, de victoire. Il ne faudrait pas se limiter au malheur social. Alors gravons les moments de joie dans nos têtes. Nous en aurons besoin.
Pour Grozeille, nous avons récolté les mots de Philippe Durand, acteur et metteur en scène, qui a décidé d’aller interviewer les ex-Fralibs pendant leur lutte. Son mot d’ordre : transmettre ces paroles, partager ces expériences. Il nous raconte leur histoire et ce qu’il en a fait. Une occasion de se pencher sur le rapport entre l’art et les luttes.
J’ai commencé à m’intéresser à la lutte des Fralibs dans les journaux, comme tout le monde. C’est la curiosité qui m’a poussé à aller plus loin. Quand les ex-Fralibs ont gagné leur procès contre Unilever, j’ai proposé à la comédie de Saint-Etienne d’aller les rencontrer. Je suis comédien à l’origine, mais j’avais déjà monté un projet avec des habitants de Saint-Etienne. Je les avais interrogé sur leur histoire. Ce qui m’intéressait c’était la mémoire de la ville. Au départ, je voulais écrire quelque chose à partir de ces échanges, mais je me suis vite rendu compte que ç’aurait été une erreur. Il y avait une espèce de poésie, de philosophie populaire, une parole qu’on n’entend jamais ailleurs. Quelque chose comme « le bon sens » si cette expression n’était pas trop galvaudée. Avec les Fralibs, je voulais utiliser le même type de procédé. Je voulais raconter leur aventure sociale.
Je me suis lancé dans le projet à une époque charnière. C’était en juillet 2014, les ouvriers n’étaient alors plus Fralibs mais ils n’avaient pas encore créé leur SCOP. J’ai eu du mal à les joindre par téléphone donc je suis allé les voir. À l’époque, ils étaient très occupés : ils faisaient des formations, de la mise en place pour le lancement de la SCOP mais ils ont accepté que je les interroge.
Fralib c’est une usine qui était détenue par une multinationale anglo-néerlandaise, Unilever. Le géant de l’agroalimentaire a racheté la marque marseillaise Éléphant en 1972. Depuis, l’usine servait à la fabrication des thés de cette marque et de Lipton. Depuis 1972, les Fralibs bossent donc pour Unilever dans deux centres de production, un au Havre, un à Marseille. Mais en 1998, la multinationale a décidé de fermer le centre du Havre pour tout regrouper sur Marseille et faire des économies. Ça a été l’occasion de grèves et de luttes. Presque en vain, finalement 54 familles se sont déplacées jusqu’à Marseille pour garder leur emploi, les autres ont dû quitter l’entreprise. Pour les 54 familles qui avaient déménagé, il avait été promis que la production d’Unilever serait pérenne. Fralib constituait un important pôle de production européen. C’est pour ça qu’elles sont parties. Ce trajet c’était pas rien. Pour des Havrais, Marseille c’est loin et c’est surtout une culture différente. Malheureusement, 12 ans plus tard, Unilever décide de délocaliser tout en Pologne et un peu en Belgique. Là les ouvriers de Fralib se sont opposés et ils se sont battus pendant près de quatre ans pour conserver leurs emplois, leur usine et créer une coopérative. Ils ont réussi, aujourd’hui ils sont devenus les SCOP-Ti.
Je raconte leur lutte grâce à leur témoignage dans mon spectacle. 1336 jours de combat, c’est exceptionnel. Ça a d’abord été une lutte juridique. Jour après jour, il a fallu contester les PSE, les Plans de Sauvegarde de l’Emploi, qu’eux appellent Plans de Sabotage de l’Emploi. Ils ont tous été invalidés par les tribunaux, mais à chaque fois ça prend du temps. C’est ça qui fait que les ouvriers sont souvent dépossédés. Le temps que le jugement se fasse, les multinationales récupérent les machines et après y a plus d’industrie, y a plus d’usine, y a rien à faire quoi. C’est pour ça qu’il faut pas faire que la lutte juridique. Il faut aussi occuper l’usine pour empêcher qu’elle soit démantelée. Heureusement, ils ont été aidés par plein de gens qui sont venus les soutenir de toute la France. Une occupation d’usine ça se fait pas comme ça. Ca demande beaucoup de temps et beaucoup de gens.
Après il y a eu aussi la lutte médiatique. Et surtout, il a fallu construire le projet qui allait suivre. Tous les ex-Fralibs se sont réinventés des métiers pour pallier au manque qu’il allait y avoir plus tard quand ils allaient lancer la SCOP. Des gens sont devenus comptables, d’autres sont devenus responsables de sécurité. Il a même fallu que certains deviennent patrons, enfin au moins responsables. La glande était interdite. Ils ont bossé pendant ces quatre ans pour créer un nouveau projet, une SCOP. Il faut un cabinet d’expertise, un avocat, ça fait partie de la lutte. Ils ont gagné le procès le 26 mai 2014 et le 26 mai 2015, un an après la signature de l’accord de fin de conflit avec Unilever, ils ont lancé leur nouvelle marque, 1336, comme les 1336 jours de luttes entre la fermeture de l’usine et leur victoire. En fait, dans les négociations, Unilever n’a jamais accepté de lâcher la marque Éléphant. C’est la raison pour laquelle ils ont dû créer une nouvelle marque de toute pièce. À cause de ça, le nouveau départ a été plus dur. Mais selon Unilever, lâcher la marque ça aurait été donner trop de pépettes aux Fralibs pour le lancement de la SCOP, ça aurait été trop facile.
Et puis après, pareil, t’y as le coté mesquin de toutes leurs transactions. Ça a démarré avec quarante et quelque mille euros. Puis t’y allais dans le bureau, y te glissaient dix mille euros de plus ; que des magouilles, que des magouilles…! Chaque fois qu’y z’ont fait des ruptures de contrat, ils l’ont fait sans le déclarer ! Tout ce qu’y faisaient, c’était de manière illégale ! Systématiquement ! Après, tu te dis : mais attends, ces gens-là, des gens costume-cravate qu’on leur donne du Monsieur, de la respectabilité, ce sont des voyous à tous les niveaux ! Et nous, des petits ouvriers qui ne demandons rien, qu’on demande qu’à vivre tranquillement : on nous traite de tous les noms, on nous brime, on nous casse ! C’est ça qui a obligé beaucoup de gens à dire non je veux pas manger, je veux pas partir avec la prime à la carotte ou la prime à la valise, je veux pas. Je vais m’en mordre peut-être les doigts, je vais perdre peut-être de beaucoup, mais je veux pouvoir me regarder la figure dans la glace en me disant : « je morfle, mais je peux me regarder en face, je peux me regarder en face. [Un extrait de la pièce]
J’ai fait le gros des interviews au printemps 2015 puis j’ai commencé à écrire ce qui est maintenant le texte de ma pièce. Mon travail c’est vraiment un travail sur l’oralité. Je voulais rendre leur voix le mieux possible. Livrer des paroles. Il fallait capter la plus infime inflexion de voix. Et puis, j’ai aussi utilisé les souvenirs de leur rencontre, ma partie sensible. Je ne parle jamais en mon nom dans le texte. Je partage ce que les ouvriers ont à raconter comme je l’ai ressenti. Les voix, les mots qu’ils emploient, j’ai essayé de garder les mêmes. Conserver même les fautes de français, les répétitions, la façon dont ils le disent.
J’ai tenu à garder une forme très brute pour mon spectacle. Je ne cherche pas à jouer les ouvriers. Avant que je commence, y’a toujours quelqu’un du lieu qui raconte ma démarche artistique en deux trois phrases. Moi je suis à table, j’ai le texte devant moi. Même si je le connais par cœur, je le dis en tournant les pages devant moi. Ils me traversent mais je ne m’amuse pas à faire croire que je suis eux. C’est très vivant parce en quelque sorte je les ai encore à l’intérieur de moi. Y a pas de mise en scène, y a pas de noms. Cette forme qui fait un peu peur, c’était un peu dur au départ de prouver que cette forme là était la plus juste.
Peut-être que je fais un travail qui ressemble à celui d’un historien ou d’un sociologue mais ce qui prime pour moi, c’est autre chose. C’est le travail sur la langue. Les expressions. Le souci, c’est qu’un auteur de théâtre, en règle générale, il peut pas écrire comme ça. Parce que quand tu racontes ton vécu, il y a un truc de singulier et de puissant. Cette chose qu’on réduit et qu’on appelle le bon sens, je pense que c’est très riche. Et l’accent. On police toujours la langue. On a déjà viré tous les dialectes. Toute la richesse de la langue est bouffée par l’hégémonie de la langue parisienne, la langue neutre du français… Moi j’aime les accents. Ça dépend des régions mais y a des gens qui portent leur accent comme un étendard et y a des gens qui ont honte de leur accent. À Saint-Etienne ils ont en honte en tout cas. Moi je trouve ça dommage. Au contraire, je trouve que l’accent, la langue parlée, brute, c’est une richesse. C’est la raison pour laquelle j’utilise un enregistreur à côté de mon stylo.
Quand j’organisais les interviews, il s’est par exemple posé la question de savoir comment il fallait dire le texte et là je me suis retrouvé face à l’accent marseillais. En plus, il y avait une sorte d’urgence parce que j’ai terminé d’écrire deux jours avant de devoir jouer ma pièce pour la première fois, en juin 2015. Alors ça m’est venu comme ça, je me suis dit « écoute, puisque c’est cette langue que tu aimes, il faut assumer, il faut le faire avec l’accent marseillais. » Le gros danger c’était alors de pas le caricaturer, de pas rester sur le folklore ou l’anecdote. Heureusement, je viens un peu du sud et je suis un peu habitué à cette langue. Donc ça allait.
J’ai joué la pièce les premières fois devant les ex-Fralibs, puis devant des milieux militants. Le texte résonne pas mal avec des gens qui sont déjà engagé sur des questions que j’aborde dans mon spectacle : le rapport au travail, à la multinationale, le travail sans patron. Mais en fait, je défends plein de choses autres que la lutte juridique et sociale que les Fralibs ont traversée. La lutte est clairement mise au devant, mais le théâtre permet aussi d’aller voir plus loin. Leurs expériences, leur histoire, c’est tellement fort, ça raconte tellement de la société dans laquelle on vit. Je pense que c’est ça qui fait qu’ils ont été très soutenus et que les gens s’identifient à leur combat. D’ailleurs, les gens qui sont venus voir ma pièce me disent avant tout qu’ils sont touchés. Je crois que le compliment que je préfère, c’est quand on vient me voir et qu’on me dit « en fait, c’est pas un spectacle militant ! »
L’aventure des ex-Fralibs c’est une aventure positive qu’il est d’autant plus important de raconter dans les temps politiques qu’on connaît. Il faut raconter des histoires positives aussi, c’est important. Une lutte qui réussit, quelque chose de joyeux, réconfortant et enthousiasmant. Depuis 2015 j’ai joué dans des milieux a priori plutôt opposés aux forces politiques de gauche et personne n’est resté indifférent. Je pense que c’est parce que je rapporte d’authentiques paroles d’ouvriers, des paroles de vie et de combat. Nous sommes tous confrontés aux logiques absurdes de cette économie, quel que soit notre métier. C’est pour ça que ces ouvriers qui ont dit non, ils touchent tout le monde. Je suis par exemple allé jouer Saint-Etienne et il y avait une journaliste ce jour là qui m’a dit qu’elle connaissait tous les gens dans la salle et qu’ils avaient tous voté Wauquiez (le président du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes, membre des républicains). Pourtant, ils ont tous aimé.
On aimerait tous lutter contre les logiques absurdes de l’économie aujourd’hui. Les ex-Fralibs qui ont monté leur SCOP, par exemple, essayent de relancer la filière tilleul à Buis-les-Baronnies dans le sud de la Drôme. C’est là où s’approvisionnaient traditionnellement l’usine Fralib pour faire du thé mais, en plus de fermer l’usine du jour au lendemain, Unilever a décidé d’arrêter de s’y approvisionner. On est passé là-bas d’une production de 400 tonnes par an à une production de 10 tonnes. Tout ça parce qu’il était moins cher d’aller s’approvisionner en Argentine. Désormais, le tilleul est récolté en Amérique du Sud, transporté en avion jusqu’en Allemagne, découpé, conditionné en Pologne et vendu uniquement en France. Au niveau local, quand la production est divisée par 40, c’est un coût social terrible. Le coût écologique n’en parlons pas. Ça on le vit tous aujourd’hui.
À un moment, ils nous arrivent, ils nous disent — bon, les gars, on va mettre un nouveau produit : et c’était « acide sulfate aspartame ». Et un autre. On met ce produit-là dans les recettes, et on s’aperçoit très très vite que, déjà, t’as un goût de sucre dans la bouche… qui est horrible ! Parce que c’est très très volatil ! Et le soir, on prend la douche, on se passe le doigt, comme ça : on était encore sucré ! Alors, au début, c’est rigolo : « Ha oui, regarde ! Je suis sucré. Ha oui ! Oui, oui, je suis sucré ! » Mais après, tu te dis c’est pas possible : tu prends deux douches et t’es encore sucré. Ce goût de sucre, dans la bouche, tu te dis « Merde… ». Alors on va sur Internet et on se renseigne sur les produits, l’aspartame, etc. On voit déjà que c’est des produits Monsanto. Et on connaît Monsanto ! L’agent orange au Viêt Nam, tout ça. À l’époque, on sait ça. On s’aperçoit qu’y a beaucoup de choses néfastes. Enfin… Un coup on va te dire que c’est très dangereux et un coup on va te dire que y a aucun souci, suivant qui paye les expertises, quoi. Etc. Etc. On se dit : on veut en avoir le cœur net. On va voir le directeur, on montre les dents. De suite on a une réunion avec le directeur. On lui montre tous les papiers qu’on a, et le premier truc qu’il dit, c’est : « Vous savez aller sur Internet ? » C’était en 1999/2000. Et là, on l’a mal pris. Souvent, on s’arrangeait entre la direction et nous, sans passer par les syndicats, les trucs du personnel, les machins. Du moment que nous on était tous d’accord, on allait là-bas et on disait « ça, ça, ça et ça, ça ne va pas », mais là, comme il le prenait comme ça… « Eh ben écoutez, c’est bon, on va arrêter là, on va sortir, on va aller voir les responsables syndicaux, puisque vous nous prenez pour des cons, vous allez vous arranger avec eux. » De là, on a eu : des masques respiratoires avec des filtres, on a eu des lunettes, on a eu des blouses longues, des gants, enfin, on a eu un scaphandre quoi. Et à part ça, c’était pas dangereux… [extrait de la pièce]
La pièce parle aussi du rapport au travail. Et je pense qu’on est tous aussi confrontés à ce problème actuellement. Avant les Fralibs étaient très fiers de l’aromatisation naturelle qu’ils faisaient eux-même, sur place. Ils étaient les seuls en Europe à produire du thé de manière industrielle avec des arômes naturels. Il faut un certain savoir faire qui s’apprend pas comme ça. Et avant de fermer, pour des problèmes de coût, encore, Unilever est passé à l’aromatisation chimique. Ça veut dire que ce sont des petites billes qui sont dans les sachets et qui libèrent la saveur au contact de l’eau chaude. On passe d’un savoir-faire traditionnel, qui délivre un thé de qualité, à un truc où t’as juste à appuyer sur un bouton, tu mélanges des billes à du thé et en plus toi fais un thé dégueulasse avec un goût chimique. Là la valeur travail elle en prend un coup. Comme le dit un ouvrier dans une interview : « quand tu fais de la merde, tu le sais. »
Quand il y avait une boîte en fer avec le produit naturel, que tu l’ouvrais, un mois ou deux mois après, ça sentait bon. Mais avec ces arômes synthétiques, non. Puisque les arômes synthétiques vont te dégager leur odeur au contact de l’eau chaude. Ce qui fait que ça sent moins. Donc les consommateurs qui achetaient leurs boîtes en fer — qui est quand même un produit plus cher que la boîte normale, puisque c’est du thé en vrac censé être du bon thé. Eh ben, ils se sont plaints. Donc Unilever a trouvé la parade en tapissant l’intérieur de la boîte par un arôme liquide, avant de mettre le produit. Et ça sentait bon ! Et cet arôme liquide, c’était de petits bidons où y avait la tête de mort dessus. Attends, c’est violent ! Ho mais, les copains, ça vous a pas dérangé un moment ?! Tu peux pas, t’as quand même ta conscience. Après c’est comme ceux qui travaillent dans les prothèses mammaires, quand on te dit « Bon les gars, y a des contrôles, faut planquer ça ça et ça ». Et puis là, c’est grave ! C’est la santé, comme nous. C’est l’agro-alimentaire, quelque part tu t’impliques là-dedans. [extrait de la pièce]
Certes ma pièce parle d’une lutte très singulière et très forte mais on entend avant tout des ouvriers qui parlent de leur rapport au travail, de leur rapport à la société. Il y a une simplicité, il y a une poésie. Voilà ce qui m’intéresse avant tout. La poéticité, la singularité de leur parole. Il y a une langue qu’on entend pas beaucoup sur les plateaux télés, ni sur les scènes de théâtre. C’est une langue orale, les mots, les expressions. Il y a vraiment une vie. C’est délicat à expliquer mais voilà, c’est une parole puissante.
Pour moi, ce que permet le théâtre c’est de transmettre une telle vie. D’une manière générale je n’aime pas le théâtre qui va s’avouer politique de manière trop frontale. Pour moi, il n’a pas d’efficacité dans ce théâtre là parce qu’il ne prêche que des convertis. Il ne va pas faire bouger les choses. Moi je suis plutôt amateur d’un théâtre à la Vinaver ou d’autres auteurs qui ne vont pas être dans un affrontement direct. Cependant, ils vont créer un petit décalage et faire réfléchir véritablement. Trop souvent, les spectacles qui se disent politiques m’assènent de discours mais ça ne m’intéresse pas plus que ça. Pourtant je pense qu’on peut vraiment aller chercher quelque chose d’autre dans le théâtre, qui est intimement politique, mais d’une autre manière.
Je ne pense pas qu’il y ait une leçon à tirer de la lutte des ex-Fralibs. La lutte, la construction de la coopérative, le travail sans patron, la prise de décision ensemble, ça a toujours été très complexe. Les ex-Fralibs ont toujours été dans la recherche, dans la pensée. C’est toujours très actif. C’est une histoire de petits ajustements, de petites réactions en situation. Avec beaucoup de lucidité, ils essayent d’avancer. Pour cette raison, je trouverais ça dommage de traiter de tout ça avec des gros sabots. Au contraire, je pense que ce qui aide c’est d’essayer de raconter tout ça sans perdre de sa complexité. Après il peut y avoir des réflexions diverses et variées mais moi je ne fais que donner à entendre. Le reste c’est le travail du spectateur.
Au niveau pratique, Philippe Durand est entrain de construire la tournée future de la pièce 1336 (Paroles de Fralibs). Pour l’instant, il a quelques dates prévues. Il va jouer à la Maison des Métallos à Paris le 14 Octobre, le 2 et le 3 décembre et à la fête de l’huma. Nous vous invitons à aller assister à sa pièce.
Crédit photographies : Stéphane Burlot.
Notes
1. | ↑ | SCOP est l’acronyme de société coopérative et participative (et, jusqu’en 2010, de société coopérative ouvrière de production). Il en existe, en France, plus de 2 000. Les salarié.es détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Si tous les salarié.es ne sont pas associés, tous ont vocation à le devenir. Dans une Scop, il y a un dirigeant comme dans n’importe quelle entreprise. Mais celui-ci est élu par les salarié.es associé.es. |